- EUGLÉNOPHYCÉES
- EUGLÉNOPHYCÉESLa classe des Euglénophycées groupe des Algues unicellulaires très communes dans les eaux douces et saumâtres. Plusieurs espèces cultivées dans des laboratoires constituent un matériel de choix pour les recherches sur la physiologie cellulaire (photosynthèse, métabolisme, besoins en vitamines, croissance, phototactisme, etc.).Les Euglénophycées possèdent deux flagelles inégaux insérés au fond d’une dépression apicale, et les réserves sont constituées par du paramylon, substance glucidique non colorable par l’iode. Les unes sont plastidiées, les autres incolores, et certaines peuvent facilement perdre leurs plastes. On les a donc considérées pendant longtemps comme un exemple du passage du règne végétal au règne animal. Mais il faut souligner que cette évolution existe chez tous les Phytoflagellés et n’est pas propre à ce groupe de Protistes.1. Étude d’une euglèneEuglena viridis , espèce fréquente dans les eaux polluées (fig. 1), se présente comme une cellule fusiforme (50 猪m 憐 12 猪m), légèrement arrondie vers l’avant, terminée par une courte pointe vers l’arrière. Elle est entourée d’une pellicule réfringente parcourue de fines striations qui dessinent une spirale sénestre. Cette pellicule est épaisse, mais déformable. En effet, la cellule peut se renfler dans sa partie moyenne et prendre une forme en toupie. Ces déformations, progressant lentement d’une extrémité de la cellule à l’autre, provoquent un mouvement de reptation caractéristique dénommé métabolie.Près de l’extrémité antérieure, la pellicule s’invagine à l’intérieur de la cellule, et délimite un réservoir, sorte de poche profonde, qui communique avec l’extérieur par un étroit goulot. Une vacuole pulsatile jouxte le bord ventral du réservoir et vient y déverser rythmiquement son contenu.Du fond du réservoir partent deux flagelles. Seul le flagelle locomoteur émerge du goulot. Il est plus long que la cellule et porte dans sa partie proximale un renflement latéral ou photorécepteur, placé au niveau du stigma, accolé à la paroi dorsale du réservoir. Ce système constitue l’appareil photosensible des euglènes. Le second flagelle, beaucoup plus court et plus grêle, ne sort pas du goulot.Le plaste est découpé en rubans plastidiaux qui convergent vers un pyrénoïde central, entouré de paramylon.En arrière du pyrénoïde se trouve un gros noyau sphérique à caryosome central et grains de chromatine périphériques.L’addition de colorants vitaux au milieu d’observation permet de faire apparaître des corps mucifères, petites sphérules périphériques alignées le long des stries pelliculaires.2. Principaux caractères cytologiques des euglènesLa pelliculeEn coupe transversale (fig. 2 et 3), elle présente une structure en dents de scie, c’est-à-dire une succession de plis et de sillons qui correspondent aux stries visibles sur l’espèce vivante. Ces figures montrent que la pellicule est un assemblage d’un certain nombre de rubans, ou bandes cuticulaires, disposés selon une hélice plus ou moins serrée. Ils sont toujours constitués des mêmes éléments, mais leur taille, leur nombre et leur profil peuvent varier selon les espèces. Chaque bande cuticulaire (fig. 3) est formée par:– une membrane cytoplasmique continue;– une strate protéique interne, d’épaisseur très variable, interrompue au niveau de chaque interbande et pouvant former un bourrelet antérieur et des prolongements transversaux plus développés chez certaines espèces;– des vésicules et saccules d’origine ergastoplasmique;– des microtubules protéiques longitudinaux, de 25 nm de diamètre, en nombre variable, mais toujours groupés en certains points définis;– des microfibrilles transversales réunissant les différentes bandes et les deux bords d’une même bande.Il y a N/2 bandes cuticulaires à la base du goulot, N à partir du bord distal du goulot, puis N/2, N/4 vers la pointe terminale. Chez E. viridis , le nombre N est égal à 40. Le nombre, le profil et la structure des bandes cuticulaires conditionnent la morphologie cellulaire et l’intensité de la métabolie. Chez certaines espèces, les bandes sont aplaties et la cuticule paraît lisse (ex. Scytomonas ). Chez d’autres, les sillons sont très larges (aspect cannelé d’Entosiphon ). Dans d’autres cas, les plis peuvent être au contraire très aigus, et les bandes cuticulaires dessinent alors de véritables crêtes à la surface de la pellicule (divers Phacus ou Petalomonas ).Diverses formations internes ou externes suivent le trajet des bandes cuticulaires:– du côté interne, on trouve les corps mucifères, vésicules contenant une substance spumeuse (glycoprotéines); ils sont très développés chez certaines espèces (E. stellata , E. splendens par exemple), absents chez d’autres (Scytomonas ) ou remplacés par de longs tubes à structure plus complexe (Entosiphon );– du côté externe, les sécrétions glycoprotéiques peuvent constituer une enveloppe continue autour de la cellule (stade palmella) ou bien des rangées de petits cubes (ornementation cuticulaire de E. spirogyra , divers Phacus ); chez les Colacium , elles s’assemblent sur le bord du goulot en un pédoncule fixateur, tandis que chez les Trachelomonas elles participent à la formation de la coque; souvent, ces sécrétions contiennent des oxydes de fer et prennent une teinte brune.Le complexe vestibulaireLa différenciation des bandes cuticulaires se fait au niveau du goulot. Le réservoir est donc limité par une simple membrane. Les tubules sous-pelliculaires naissent à proximité des cinétosomes. Certains suivent les parois du réservoir et du goulot, d’autres forment un manchon hélicoïdal.La vacuole pulsatile est un ensemble de vésicules de forme et de taille très variables, certaines pouvant provenir de l’appareil de Golgi.Parmi les Eugléniens, il y en a qui, dépourvus d’appareil plastidial, se nourrissent par phagocytose et possèdent un appareil pharyngien permettant la capture et l’ingestion des proies. Il est formé par une invagination de la membrane cytoplasmique, à partir de laquelle s’isolent des vacuoles digestives, et par une sorte de cytosquelette protéique plus ou moins complexe selon les espèces. Chez Peranema , on distingue, par exemple, deux baguettes longitudinales placées sur le bord du goulot (fig. 4) et formées chacune par un faisceau de microtubules de 25 nm de diamètre, reliés les uns aux autres par des tractus fibreux.La cinétidePresque tous les Eugléniens possèdent deux flagelles inégaux partant de cinétosomes placés dorsalement sous la paroi du réservoir.La zone située entre le cinétosome et le flagelle proprement dit, ou zone de transition, présente chez les Eugléniens une structure très originale. Le flagelle comprend un axonème constitué de neuf doublets périphériques, deux fibres centrales, une membrane légèrement plissée et une gaine dilatée sur le côté (fig. 5). Celle-ci renferme une armature fibrillaire, cylindrique dans le flagelle antérieur locomoteur, organisée en un système paracristallin complexe dans le flagelle récurrent de certains genres (Distigma , Anisonema , Entosiphon , par exemple). La membrane flagellaire est doublée intérieurement par plusieurs bandes spiralées qui supportent de très nombreux filaments externes appelés mastigonèmes.Les constituants cytoplasmiquesLe nombre, la forme et la taille des plastes varient considérablement chez les euglènes. Pour simplifier, on distinguera trois types. Le plus primitif est un plastidome unique comportant un pyrénoïde central et des lames plastidiales rayonnantes, comme chez Euglena viridis . Le deuxième type, plus fréquent, comporte plusieurs plastes possédant chacun un pyrénoïde. Les plastes sont soit en forme de verre de montre, le pyrénoïde faisant saillie du côté interne (ex. Colacium ), soit foliacés (ex. E. gracilis ) ou découpés, le pyrénoïde restant central. Dans le troisième type, le plastidome est fragmenté en nombreux plastes lenticulaires dépourvus de pyrénoïde (ex. E. acus ).La structure des plastes est conforme au type lamellaire primitif. Mais il faut souligner que, chez les euglènes, le paramylon et le stigma sont toujours extraplastidiaux.Les réserves sont le plus souvent constituées par du paramylon et, accessoirement, des lipides (Scytomonas ). Le paramylon est un polymère de glucose en liaison 廓 1-3. Il s’accumule dans des vacuoles, formant des calottes coiffant le pyrénoïde, des granules épars dans le cytoplasme, des anneaux circulaires (Phacus ) ou quadrangulaires (E. spirogyra ), des baguettes (E. acus ). Il est souvent anisotrope et de structure hétérogène (aspect feuilleté ou spiralé).Les mitochondries à crêtes septiformes, comme chez la plupart des Métaphytes et Métazoaires, s’assemblent en un réseau superficiel, plus développé chez les formes aplastidiées (fig. 2).L’appareil de Golgi est constitué de dictyosomes épais pouvant avoir jusqu’à quarante saccules, certains étant associés à la vacuole pulsatile.Le noyau et la caryocinèsePlacé le plus souvent au centre de la cellule, le noyau est sphérique ou allongé (E. acus ) et contient un ou plusieurs endosomes ou caryosomes (nucléoles persistant pendant la division). Les chromosomes restent à l’état condensé, donc visible, pendant tout le cycle nucléaire (fig. 2). La membrane nucléaire persiste pendant la division.Lors de la caryocinèse, un faisceau de microtubules apparaît autour de l’endosome, près des chromosomes, et, dans certains cas, les cinétosomes forment les pôles de division.3. Biologie. ÉcologieDéplacementChez la plupart des Eugléniens, la progression est une nage selon une trajectoire hélicoïdale. Chez Peranema , Petalomonas , Scytomonas , etc., le flagelle antérieur fonctionne comme tractelle et la cellule semble glisser lentement. Chez Entosiphon et Anisonema , le flagelle récurrent, moins souple, adhère au substratum. Certaines espèces peuvent perdre leur flagelle et progresser par glissement sur le substratum ou par métabolie. Ces mouvements, dus aux déformations et aux articulations des différentes bandes cuticulaires sous l’action des microfibrilles transverses, ne se produisent que chez les espèces à bandes cuticulaires souples et mobiles. Enfin, l’expulsion rapide du contenu des poches mucifères sert parfois (E. splendens ) d’organe de propulsion fonctionnant par réaction.Lorsque les conditions deviennent mauvaises (assèchement par exemple), les euglènes cessent tout mouvement, s’arrondissent et s’entourent d’une épaisse couche de mucilage formant une enveloppe kystique. Elles peuvent, sous cette forme, s’associer (stade palmella) en un voile recouvrant la surface des mares.ReproductionLa reproduction asexuée se fait par division longitudinale de la cellule précédée d’une duplication de la cinétide. Le plan de division naît au niveau du réservoir et progresse vers l’extrémité caudale en suivant des interbandes cuticulaires. Chaque cellule fille n’hérite que de la moitié du nombre des bandes cuticulaires. Au cours de la croissance, de nouvelles bandes se formeront entre les anciennes. L’appareil pharyngien disparaît en début de division et se reforme très rapidement dans chaque cellule fille.La reproduction sexuée semble tout à fait occasionnelle et l’accouplement de deux gamètes avec formation d’une cellule œuf n’est observé que chez le genre Scytomonas .NutritionLes euglènes peuvent être phototrophes, hétérotrophes, phagotrophes.De nombreux Eugléniens sont pourvus d’un appareil photosynthétique comme les végétaux supérieurs. Les plastes des euglènes renferment de la chlorophylle a et b et des pigments caroténoïdes. Pourtant, les essais de culture ont montré qu’aucun Euglénien vert n’est entièrement photo -autotrophe . Tous sont photo -auxotrophes et ont besoin de vitamines (vitamine B12 ou vitamine B1).Certains Eugléniens incolores sont dépourvus d’appareil plastidial et d’appareil pharyngien (ex. Astasia , Menoidium , Cyclidiopsis , etc.). Ce sont des hétérotrophes stricts qui ne se développent que sur des milieux contenant des substances organiques. Ils absorbent ces substances à l’état dissous et ils sont dits, pour cette raison, osmotrophes. Mais certains Eugléniens verts, par exemple E. gracilis , sont des hétérotrophes facultatifs , c’est-à-dire capables de se développer à l’obscurité si le milieu contient des substances organiques.Euglena gracilis variété bacillaris , cultivée à l’obscurité en milieu organique, s’étiole, et ses plastes se transforment en proplastes par perte de la structure lamellaire et des pigments. Remis à la lumière, ceux-ci sont capables de régénérer des lamelles et de resynthétiser de la chlorophylle. La transformation est donc réversible. Mais des souches vertes, traitées soit par divers agents physiques à dose sublétale tels les rayons ultraviolets ou des températures de culture élevées, soit par des agents chimiques tels les antibiotiques, restent définitivement incolores. Elles sont devenues des hétérotrophes stricts aplastidiés. Ces divers agents sont donc capables d’inhiber la reproduction des plastes. Ainsi croit-on expliquer l’origine de certaines formes incolores (Astasia ).De nombreuses espèces aplastidiées sont phagotrophes . Les proies ingérées grâce à l’organe pharyngien sont digérées dans des phagosomes. Les déchets sont évacués au niveau d’un cytoprocte.ÉcologieLes besoins nutritifs des euglènes expliquent leur abondance dans les eaux riches en matières organiques. Ce sont des indicateurs de pollution.La plupart vivent en eau douce et peuvent supporter des écarts de pH importants (de 3,5 à 9 pour E. gracilis ). On les trouve soit dans le plancton, soit sur les fonds boueux, soit sur la terre humide en bordure des mares et des fossés.Quelques espèces, en particulier Eutreptia viridis , vivent en eau saumâtre et sont fréquentes dans les estuaires.Enfin, quelques Eugléniens sont parasites ou commensaux: Hegneria et Euglenomorpha vivent dans le tube digestif des têtards de grenouille; d’autres parasiteraient les Copépodes.4. SystématiqueLes Euglénophycées contiennent de la chlorophylle b et appartiennent avec les Volvocales au groupe des Chlorophytes défini par Christensen. Mais la morphologie hélicoïdale et de nombreux caractères cytologiques, en particulier la structure pelliculaire, la structure de la cinétide (zone de transition), l’organisation du complexe goulot-réservoir-vacuole pulsatile, les séparent des Volvocales et des autres Algues inférieures.Bien qu’on les ait pendant longtemps rapprochées des Dinophycées, Cryptophycées, Chloromonadophycées, on pense maintenant que les Euglénophycées constituent une classe isolée, ayant évolué vers l’hétérotrophie et la phagotrophie. Il y a au moins 1 500 espèces qui se répartissent entre les Euglenina , à affinités végétales, plastidiées ou non, mais ne possédant jamais d’organe pharyngien, et les Peranemina , à affinités animales, jamais plastidiées et toujours pourvues d’un organe pharyngien.Suivant la morphologie des flagelles les Euglenina se subdivisent en quatre familles:– les Euglenomorphidae , à quatre flagelles égaux;– les Eutreptiidae , à deux flagelles égaux sortant du goulot;– les Distigmidae , à deux flagelles inégaux sortant du goulot;– les Euglenidae , à deux flagelles inégaux, un seul sortant du goulot; elles peuvent être fusiformes (Euglena ), cordiformes (Phacus ), logées dans une coque sécrétée par la cellule (Trachelomonas ), ou bien fixées par un pédoncule sécrété par la cellule (Colacium ); de nombreux représentants sont aplastidiés: Astasia , Hyalophacus , Menoidium , etc.Les Peranemina comprennent:– les Peranemidae , à deux longs flagelles, dont un récurrent, à appareil pharyngien de plus en plus complexe chez Peranema , Anisonema , Entosiphon ;– Les Petalomonadidae , à deux flagelles, dont un seul émerge du goulot, et à appareil pharyngien peu développé (Petalomonas à cellule aplatie; Calycimonas à section circulaire);– les Scytomonadidae à un seul flagelle (ex. Scytomonas ).euglénophycées [øglenɔfise] n. f. pl.ÉTYM. XXe; var. euglénidés, n. m. pl., 1901; eugléniens, n. m. pl., 1870; de euglèn(e), et (chloro)phycées.❖♦ Bot. Groupe d'algues unicellulaires, de couleur verte, dont le type est l'euglène. — Au sing. || Une euglénophycée.
Encyclopédie Universelle. 2012.